Professionnels

Comarquage

Recouvrement judiciaire : injonction de payer en France et en Europe

Une entreprise doit réagir rapidement pour obtenir le paiement de ses impayés. En cas d'échec du recouvrement amiable (relance par téléphone, mise en demeure), elle peut déposer une injonction de payer devant le tribunal (de commerce ou judiciaire). Lorsque le débiteur est domicilié dans un autre État de l'Union européenne (UE), (à l'exception du Danemark), la procédure d'injonction de payer européenne peut être utilisée.

2- Réagir aux premières difficultés

La procédure d'injonction de payer peut être utilisée par le créancier pour forcer un débiteur à procéder au paiement de sa ou ses dettes.

Elle peut être engagée, quel que soit le montant de la créance, dans l'un des cas suivants :

  • La créance est issue d'un contrat. Le montant de la dette doit être inscrite sur le contrat. Il s'agit par exemple d'un achat auprès d'un commerçant, d'un emprunt, d'une facture impayée, d'un découvert bancaire, d'une reconnaissance de dette, d'un loyer impayé, d'une caution.

  • La créance est issue d'une obligation à caractère statutaire. Il s'agit par exemple des créances dues aux organismes sociaux, aux ordres professionnels, ou encore des cotisations Urssaf.

  • La créance est issue d'un acte de commerce. Cela peut être une lettre de change, un billet à ordre, une cession de créance professionnelle .

Attention

Les chèques sans provision ne sont pas concernés par l'injonction de payer. En effet, il existe des procédures spécifiques de recouvrement.

La créance ne doit pas être . Elle doit être certaine, liquide et exigible , c'est-à-dire qu'elle ne peut pas raisonnablement être contestée par le débiteur. Elle doit être arrivée à échéance et son montant doit être déterminé.

Le créancier doit saisir le tribunal de commerce ou le tribunal judiciaire  du lieu où se trouve le débiteur :

  • Le tribunal de commerce est compétent dans les situations suivantes :

    • Lorsque le créancier et le débiteur sont tous les deux commerçants. Par exemple, le débiteur n'a pas payé une facture suite à une vente de marchandises.

    • Dans un bail commercial, lorsque le propriétaire adresse une demande en paiement contre le locataire.

    • Lorsque la créance résulte d'un acte de commerce (lettre de change, bordereau Dailly).

  • Le tribunal judiciaire est compétent dans les autres cas : lorsque le débiteur est un particulier ou exerce une profession libérale par exemple.

La demande d'injonction de payer peut être effectuée soit en remplissant un formulaire papier, soit en utilisant un service en ligne.

Le créancier doit utiliser le formulaire Cerfa n° 12946

Il faut joindre à la demande les documents qui justifient l'existence de la créance. Il s'agit par exemple des documents suivants :

  • Bon de commande et/ou contrat

  • Copie de la facture impayée

  • Lettre de mise en demeure de payer

  • Lettre de change

Le créancier doit envoyer ou déposer sa demande (requête) au greffe du tribunal de commerce du lieu du siège social du débiteur :

Où s'adresser ?

 Greffe du tribunal de commerce 

À noter

En Alsace-Moselle, c'est la  chambre commerciale du tribunal judiciaire  qui est compétente.

Devant le tribunal de commerce, le créancier doit payer des frais de greffe d’un montant de 33,47 € .

    À noter

    Le recours à un avocat n'est pas obligatoire. Cependant, le créancier peut décider de charger un avocat, un commissaire de justice (ancien huissier de justice) ou un mandataire de déposer la la requête.

    Il n'y a pas d'audience devant le tribunal et la procédure n'est pas contradictoire, c'est-à-dire que le juge prend une décision en fonction des seuls éléments produits par le créancier, sans entendre les arguments du débiteur.

    Le président du tribunal examine les documents produits pour apprécier si la demande lui paraît fondée (en tout ou partie), ou s'il doit la rejeter.

    Lorsque le juge reçoit la requête en injonction de payer, il a 3 possibilités :

    • Rejeter la demande. Le créancier ne dispose d'aucun recours. Il ne peut pas faire appel, mais il peut engager une procédure judiciaire d'assignement en paiement.

    • Accepter la demande. Le juge rend une ordonnance d'injonction de payer. Le greffe remet au créancier une copie certifiée conforme de la requête et une copie de l'ordonnance d'injonction de payer comportant la formule exécutoire.

    • Estimer que la requête est partiellement fondée. Le juge prononce alors une injonction de payer pour une partie seulement de la somme demandée. Par exemple, un créancier a demandé une injonction de payer à hauteur de 7 000 € mais rend une ordonnance à hauteur de 4 000 € . Le créancier peut alors :

      • soit renoncer à la procédure d'injonction de payer. Il peut décider d'engager une procédure judiciaire classique.

      • soit poursuivre l'exécution de l'ordonnance mais sans pouvoir alors engager une autre procédure pour recouvrer les 3 000 € restants

    Pour que l'ordonnance soit exécutée, le créancier doit la faire signifier par un commissaire de justice.

    La signification doit être faite dans un délai de 6 mois à partir de la date de l'ordonnance. Si elle n'est pas signifiée dans ce délai, l'ordonnance est caduque ((c'est-à-dire annulée).

    L'acte de signification comprend les informations suivantes :

    • Sommation de payer le montant de la somme indiquée par l'ordonnance, les intérêts et frais de greffe

    • Possibilité pour le débiteur de contester l'ordonnance dans le délai d'un mois à partir de la signification de l'ordonnance. Le débiteur est averti qu'à défaut d'opposition, il ne pourra plus exercer aucun recours.

    • Avertissement au débiteur qu'il peut prendre connaissance des justificatifs fournis par le créancier au greffe. Les justificatifs fournis par le créancier sont également accessibles via la plateforme Mespièces.fr. Si ces documents ne peuvent pas être mis à disposition sur la plateforme, ils doivent être joints à la requête lors de sa signification.

  • Mespieces.fr
  • Si l'ordonnance signifiée n'est pas contestée par le débiteur, elle devient alors un titre exécutoire. Elle produit les effets d'un jugement définitif, c'est-à-dire non susceptible d'appel. Le créancier est ainsi autorisé à procéder à des mesures d'exécution forcée (par exemple une saisie) en cas de non-paiement de sa créance.

    À savoir

    La signification de l'ordonnance d'injonction de payer entraîne des frais de commissaire de justice qui sont payés par le créancier.

    Le débiteur peut contester l'injonction de payer. Pour cela, il doit faire opposition (en remplissant un formulaire spécifique) dans un délai de 1 mois à compter de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer.

    S'il fait opposition, il n'a pas à exécuter l'ordonnance, c'est-à-dire à payer la somme réclamée : on dit que l'opposition est suspensive.

    L'opposition doit être effectuée devant le tribunal qui a rendu l'ordonnance d'injonction de payer : soit le tribunal de commerce, soit le tribunal judiciaire.

    Pour faire opposition, il faut remplir le formulaire de déclaration d'opposition suivant :

    Il faut joindre tous les documents utiles (copie de l'ordonnance d'injonction, copie de l'acte du commissaire de justice , etc.).

    Le formulaire d'opposition à injonction de payer peut ensuite être transmis de l'une des façons suivantes :

    • soit adressé au greffe du tribunal de commerce par courrier recommandé avec accusé de réception ou déposé contre récépissé :

    Où s'adresser ?

     Greffe du tribunal de commerce 

    • soit transmis via le Tribunal digital. Celui-ci permet d’agir en justice devant le tribunal de commerce de façon totalement dématérialisée :

    À savoir

    L'opposition à l'ordonnance peut être rédigée sur papier libre.

    Lorsque le débiteur a fait opposition à l’ordonnance d’injonction de payer, le greffier convoque le créancier et le débiteur à l’audience du tribunal. La procédure devient contradictoire : le juge entend donc les arguments de chacune des parties, du débiteur et du créancier. Il examine les pièces qui lui sont remises et pose les questions qu’il estime utiles.

    Le créancier doit être présent à l'audience ou être représenté par un avocat. La présence de l'avocat n'est pas obligatoire sauf lorsque le litige porte sur une somme supérieure à 10 000 € .

    Le tribunal rend ensuite un jugement qui remplace l'ordonnance d'injonction de payer.

    À savoir

    Si aucune des parties ne se présente à l’audience, l’instance est éteinte et l’ordonnance d’injonction de payer devient caduque.